Les décors du patrimoine

C’est écrit sur les murs
De nombreuses inscriptions, dates, sont visibles au détour des rues de Landerneau. Si elles n’ont pas, comme source historique, le prestige d’une archive ou d’une information recueillie lors de fouilles archéologiques, elles sont pourtant de première importance.
On peut leur associer les blasons qui représentent de vrais signes extérieurs de noblesse. Le blason est constitué de l’écu qui est l’objet sur lequel on dessine les signes et les figures qui vont permettre d’identifier une famille, une communauté ou un homme. De nombreux blasons ont été martelés dans la ville, probablement à la Révolution, période à laquelle on souhaitait effacer tous les signes rappelant la noblesse. Les blasons ou inscriptions ne sont pas réservés à la noblesse. Les recteurs, chanoines, ou prêtres signent volontiers les demeures où ils résident par un calice, seul ou accompagné d’une date ou d’un monogramme.
Parmi les nombreuses inscriptions parsemées sur les murs de la ville, on retrouve de simples dates ou de véritables épitaphes. Elles sont essentielles car elles représentent souvent les seuls éléments historiques d’un bâtiment. Ces inscriptions sont prévues en général dès la conception d’un bâtiment. Elles ont pour but de pérenniser une date de construction, un évènement marquant, le nom d’un personnage, une devise morale ou politique. La plus belle et la plus ancienne épigraphe est celle qui est inscrite sur la pierre de fondation du pont de Rohan. En 1984, des travaux de réfection place des 4 Pompes, ont mis au jour une belle pierre gravée datant de 1612 qui porte cette inscription : « L’an 1612, Nicolas Laridon et Ysabelle Forestier sa femme ont faict bastir ceste maison ». Exemple exceptionnel car ils seront également donateurs d’un bénitier de l’église Saint-Houardon, en 1615, et sur lequel ils font aussi graver leurs noms !
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Des décors urbains cachés
À côté des épitaphes et autre bestiaire, les murs landernéens révèlent des décors purement urbains qui participent à la monumentalisation des édifices.
Sur la Place des Quatre Pompes se dresse une belle fontaine en Kersanton qui recueillait les eaux des prairies de la campagne de Saint-Thomas. Très gênante pour la circulation surtout depuis le percement de la rue de la Libération, au XVIIIe siècle, elle est rebâtie dans un style nouveau en 1774 par l’architecte Besnard. Elle possède quatre appuis pour le remplissage de quatre cruches simultanément. C’est peut-être cette disposition qui a donné son nom à la fontaine dite « des quatre pompes ».
À proximité, une curieuse maison à décor de médaillons porte la date de 1706. Si le rez-de-chaussée est sans doute d’époque, la maison d’origine a probablement été surélevée d'un étage à la fin du XIXe siècle. Les médaillons du dernier étage ne datent que de la fin du XIXe siècle et sont sans doute en ciment moulé. À cette époque le goût de l'antique transparait dans de nombreux décors architecturaux, d'autant que la partie supérieure de cette maison est d'inspiration néoclassique. Ils représentent peut-être des divinités romaines : à droite Mercure, et peut-être Mars à gauche.
Le quai de Léon présente aussi des décors de la même inspiration artistique. Ainsi la Maison des Trois Têtes, avec une corniche à gros modillons en pointe de diamant, date probablement de la 2e moitié du XIXe siècle. Cette élévation rappelle, il est vrai, les formes « classiques » du XVIIIe siècle partout très prisées jusqu'à la fin du siècle suivant. Dans les archives, cette maison est dite celle du Chapeau Rouge, dénomination qui se réfère peut-être à une ancienne fonction d’auberge, ce nom étant régulièrement attribué à ce type d’établissement, après le Moyen Âge.
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Le petit peuple de pierre
En levant les yeux, on remarque plusieurs personnages perchés au niveau des toits ou dans les angles des immeubles. Traditionnellement, ils étaient assimilés à des gardiens.
Des personnages énigmatiques dans la ville
À la sortie du pont habité, côté Cornouaille, on aperçoit le pauvre Petit Bonhomme Landerneau juché sur le mur du premier hôpital de la ville. Peut-être désigne-t-il Saint-Julien L’Hospitalier, patron des voyageurs et des pèlerins, à genoux avec son bâton et sa gourde ? Il s’agit peut-être aussi d’une représentation de « l’homme au bâton » ou « homme au gourdin » symbolisant le « gardien de la maison » contre les intrus, les mauvais esprits ou les deux à la fois. Autre personnage masculin à qui l’on pouvait prêter une fonction de défense : un soldat armé surmonté de l’inscription « Tire-Tue » installé en haut d’un immeuble de la rue François Pengam.
Des statues à caractère religieux
Dans les murs de la ville, des niches ont été aménagées pour abriter des figurines à caractère laïque mais plus généralement religieux. Véritables témoignages de la dévotion populaire, elles devaient protéger les maisons d’un mauvais sort : la maladie, la guerre ou l’incendie. Objets de culte et de dévotion dans le passé, beaucoup de statuettes ont été détruites pendant la période révolutionnaire, ce qui explique la présence de niches vides. Néanmoins beaucoup ont survécu ou ont été remplacées par d’autres figurines plus contemporaines.
Nombreuses dans les rues de la Fontaine Blanche et Saint-Thomas, celles qui sont ornées de petites vierges rappellent le passage de nombreux voyageurs sur cette route de pèlerinage entre les basiliques du Folgoët et celle de Rumengol. L’une d’elles, celle de Notre-Dame de Rumengol orne l’immeuble de l’auberge éponyme située à l’entrée de la rue Saint-Thomas.
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Animaux et créatures fantastiques
Qu'ils soient domestiques ou fantastiques, on retrouve également des ornements à figuration animale.
Entre chiens et loups
L’un des animaux les plus représentés dans la ville est le lion. Perchée dans l’angle de la Maison Gillart, une crossette à l’effigie d’un fauve tient un rouleau entre ses pattes. Ce motif est probablement le témoignage d’un besoin de reconnaissance du statut de son propriétaire, le magistrat Gillart, maire de la ville en 1686. Le rouleau représente l’écrit, la règle qui régit le fonctionnement de la société. Le lion est parfois associé au loup ou au chien comme c'est le cas sur les crossettes d’une des lucarnes de l’ancienne auberge du Réveil Matin. Il incarne ici l’animal domestique et fidèle, en accord avec la fonction d’accueil des lieux.
Sirènes et dragons
Le royaume du fantastique était apprécié par les artistes qui n’hésitaient pas à déformer le réel. Plusieurs fois représenté à Landerneau, le dragon est la créature la plus dépeinte dans l’iconographie, endossant tour à tour le rôle du protecteur ou du démon. On lui asscoie parfois le motif de la sirène. Formée d’un buste de femme et d’une queue de poisson, celle perchée sur la la Maison à la Sirène est probablement l’une des sculptures extérieures de sirène les mieux conservées de Bretagne. Elle tient dans l’une de ses mains un miroir objet symbole de la beauté séductrice.
Les gargouilles de l’église de Saint-Houardon
Décors apparus dès le XIIIe siècle, la gargouille est un dégorgeoir en saillie par lequel s’écoulaient les eaux de pluie à distance des murs et se terminant par la gueule d’une figure monstrueuse. Laissant libre cours à leur imagination, les sculpteurs ont mis au jour une faune fantastique issue des assemblages les plus irréalistes : êtres mi-humains, mi-animaux ou créatures hybrides. L’église de Saint-Houardon compte environ une soixantaine de gargouilles. La plupart ont été sculptées lors du chantier de reconstruction de 1860 ; d’autres ont été récupérées de l’ancienne église.
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La lune de Landerneau dans l’architecture ?
De multiples légendes évoquant la lune de Landerneau font référence à l’existence d’un disque doré, placé sur un monument de la ville. A-t-il déjà existé ? On ne le sait pas. Cependant, on observe fréquemment l’usage du motif de cet astre sur les murs de la ville.
Le décor de lune a élu domicile sur de nombreux monuments de la cité. Son utilisation dans l’architecture s’explique-t-il par le folklore local ou par le fait que ce ne soit qu’un type de décor très utilisé dès le XVIIe siècle ? Ce motif était très en vogue à cette période, car il rappelait les armes de Diane de Poitiers (1499 – 1566), la favorite du roi Henri II.
Place Saint-Thomas, une maison du XVIe siècle, en pierre de Logonna, porte l’appellation de Maison ou auberge des Treize Lunes. A-t-elle été construite une année à treize lunes ? Utilisait-on l’expression « la lune de Landerneau » dès le Moyen Âge ? À cette époque, de nombreuses auberges sont dédiées aux astres, comme l’« auberge de la belle étoile »….Une série de mascarons en bas-relief située sous la corniche de la façade orne cette maison.
Par ailleurs d’autres ornements en forme de lune ou de masques figurent sur l’un des murs du manoir de la Petite Palud à Landerneau, mais également sur l’un des piliers du manoir de Chef du bois à Pencran (motif aujourd’hui effacé).
Le motif de la lune se décline aussi dans l’architecture religieuse landernéenne, mais sous forme de croissant, sur les pinacles du porche de Saint-Houardon et sur les dais de la façade du porche de Saint-Thomas. On le retrouve dans d’autres lieux du Finistère : sur la base du clocher de la chapelle Saint-Fiacre de Crozon ou encore sur le soubassement du calvaire de Saint-Ségal.
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